La Côte d’ivoire au rythme du Nigéria ?
Enfant, lorsque j’entendais « Nigéria », je ne pensais qu’à une seule personne : la tresseuse Anango (en référence au peuple Yoruba). Celle qui avait l’habitude de me faire les nattes africaines sur la tête, se prénommait Adjokè . Je m’interroge souvent : comment ai-je bien pu retenir son prénom après toutes ces années (une vingtaine maintenant) ? Eh bien, je vous laisse le soin de demander à vos sœurs, femmes, mères de plus amples informations à ce sujet (je ne vous garantis pas tout de suite de réponses – comprenez-nous, les trop grandes douleurs restent parfois muettes ).
Il est bon de savoir que mon beau pays la Côte d’Ivoire compte officiellement plus de 60 ethnies locales (en Afrique les chiffres ne sont pas toujours connus avec exactitude, paradoxe avec notre couleur de peau, vous aurez saisi l’essentiel). Et donc, mon beau pays, également connu pour être un abreuvoir d’hospitalité, a entrepris depuis quelques temps (quelques longs temps d’ailleurs) un brassage culturel avec un autre pays frère : le Nigéria. Pour fusionner, il faut généralement être deux – ô qu’importe ! la Côte d’Ivoire, a plutôt décidé d’appliquer une nouvelle formule : « il y a encore plus de joie à recopier qu’à se faire copier ».
Sinon, comment comprendre un pays dans lequel :
– chaque jour, l’on s’étonne de découvrir une nouvelle ethnie ;
– à l’approche des fêtes, les habitants sont euphoriques à l’idée de passer des séjours festifs à la campagne – au point de souvent les retrouver à faire le pied de grue dans les gares durant plusieurs jours ;
– l’on surprend certains d’entre nous à parler leur patois entre deux mots ou trois mots de langue française ;
– il existe des villages de tisserands, des marchés et des magasins artisanaux à profusion ;
– les mères, grands-mères possèdent des malles ou des cantines de pagnes et de parures, qui n’attendent que l’avènement de cérémonies spéciales (mariage, baptême, sortie de nouveau-né…) pour faire briller les « emprunteurs du jour » de mille feux ;
– Michael Jackson (himself) fut proclamé roi du Sawi et stylé traditionnellement pour l’occasion ; (arrêtons là, la liste d’arguments – le listing du patrimoine culturel – la beauté de nos attributs qui rivalisent et varient de région en région)
On en arrive à importer et à reproduire dans les moindres détails, les us et coutumes de nos frères d’à côté, sans que cela ne choque, n’étonne ou n’effraie la majorité. C’est le cas des présentes cérémonies de mariage en Côte d’Ivoire : les tenues, les mets, le maquillage de la mariée sans oublier la musique, sont souvent calqués sur le Nigéria voisin (ces derniers temps, je dois bien avouer que mon peuple rivalise avec la Chine en matière de reproduction de masse : pagne addis abeba, naija power…). Et pourtant, tous s’accordent déjà à dire que la génération actuelle est déracinée, mais qu’en sera-t-il de celles à venir (dans l’ombre des racines) ? Il n’y a rien de mal à apprécier une culture autre, mais il y a tout de mal à la prioriser au détriment de sa propre culture…
Ayant besoin d’avis autres, j’ai posé la question à une jeune fille de mon entourage pour savoir ce qu’elle en pensait et elle m’a répondu ceci : » quand il s’agit de copier les attitudes des blancs cela ne vous dérange pas, mais quand entre frères noirs on se triche un peu, là vous êtes indignés – il n’y a pas de mal à cela – de toutes les façons nous sommes tous Africains, nous avons à peu près les mêmes manières de faire donc je ne vois pas trop où est le problème ? Leurs tenues sont belles c’est pourquoi, on les porte nous également, lorsque l’occasion se présente. «
PS: Quitte à continuer sur notre lancée, il faudrait peut-être jeter un coup d’œil à leur développement économique également.
Chers lecteurs, vos avis et vos expériences sur le sujet nous intéressent, n’hésitez pas à rebondir en commentaires … Merci
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